2/ Just call me Mortimer: le Kentucky à silex chez les Gros Ventres part 1/
Page 1 sur 1
2/ Just call me Mortimer: le Kentucky à silex chez les Gros Ventres part 1/
Bonjour à toi l’ami qui prend le temps et le courage de me lire. Tu excuseras mon Français quelques fois approximatif. Nous sommes en 1890 et n’ayant jamais été à l’école, j’ai appris avec ma mère à lire et écrire pendant les longues soirées à la lueur des bougies. Je ne suis bavard que quand j’écris car dans ma vie mes armes ont toujours été plus bavardes que moi. Faire parler la poudre a toujours la conversation favorite de ton ami Douglas Mortimer Le Jouan. Bien à toi…
Après avoir quitté la Louisiane vers 1829 mes parents et leur fils unique que je suis, sommes arrivés au terme d’un très long périple au Nord de ce que mon père appelait le Nord, pratiquement à la frontière d’un autre pays des grands froids, le Canada.
Au cours de notre voyage interminable sur et dans le chariot bâché tiré par deux bons chevaux de labours achetés à bas prix, nous avons rencontré pas mal de spécimens de la race humaine. Des blancs, des noirs, des rouges, mais pas de jaunes. Les blancs et les noirs je les connaissais, mais les indiens m’intriguaient par leurs langages que je ne comprenais pas, leur façon d’être, leur maintien, leurs vêtements, bref pour moi enfant, ils semblaient venus d’ailleurs, mystérieux.
Plus tard j’ai compris qu’en fait, ils n’étaient pas d’ailleurs, mais bien sur la terre de leurs ancêtres et que nous, étions comme des intrus sur leur sol. Ce qui expliquait le comportement de certains groupes hostiles que nous avions croisé sur notre route.
Ceux qui m’avaient le plus intimidés étaient les Cheyennes. J’avoue rétrospectivement avoir été marqué par leur rencontre. Ils étaient pour moi plus grands et longilignes que les autres et me paraissaient aussi plus farouches. Le genre d’hommes qui d’un seul regard te fait comprendre que la vie est éphémère.
Je les trouvais différents et plus nerveux que les Sioux qui eux avaient de magnifiques coiffures et de belles broderies sur leurs vestes. Ceux-là me paraissaient plus calme, plus fiers, mais guère plus câlins, mais ne nous ont jamais attaqué, pas plus que les autres d’ailleurs. Souvent ils nous suivaient des journées entières à bonne distance, mais ne cherchaient pas le contact, sauf quelques fois quand ils s’enhardissaient pour nous quémander du café ou vouloir faire du troc.
Et puis nous voilà arrivés face à cette tribu peinte en blanc avec des traits rouges sur les joues, nous barrant le chemin au pied de la colline avec leurs mains écartées devant leur ventre.
Quelques jours auparavant nous avions croisé un trappeur qui marchait à pied tenant à la bride une mule chargée de son équipement et tirant un travois indien chargé de peaux de toutes sortes.
Voyant le Kentucky de mon père, il lui demanda si nous étions également trappeurs en quête d’un coin pour la chasse. Il parut soulagé quand mon père lui répondit par la négative et nous expliqua que dans cette contrée une tribu de peaux rouges s’en prenait méchamment aux trappeurs en général et qu’il serait bon de les éviter.
Mais revenons quelques pas en arrière quand nous nous trouvions assis face à ces guerriers, car sans aucun doute possible c’en étaient au vu de leurs peintures.
La palabre, à mon grand étonnement se faisait en grande partie en Français et par gestes. Le Guerrier assis à côté du chef avait fier allure et c’est lui qui s’exprimait très bien dans notre langue filiale et le Chef ponctuait les phrases par des hochements de tête et des « Oui, Oui …»
Il nous expliqua qu’ils faisaient partie de la tribu des « Gros Ventres » ainsi nommés par les Français dont ils furent longtemps amis il y a beaucoup de lune passées et que lui-même « Cheval rouge » et son frère le chef assis à côté de lui « Griffe d’ours debout » avait eu un Grand père Trappeur Français, Breton d’origine, qui avait vécu dans la tribu la plus grande partie de sa vie et avait épousé une femme indienne de la tribu des faces plates (Flat Heads) prisonnière des Gros Ventres.
Ce à quoi mon père répliqua qu’il avait les mêmes origines et que certainement le même sang coulait dans nos veines.
La glace était définitivement rompue et ils nous guidèrent jusqu’à une immense prairie au bord d’une rivière pour établir notre campement. Ils nous regardaient faire d’un air curieux et amusé, inspectant les casseroles et marmites en métal de ma mère qui pour une fois ne les virait pas à coup de torchon ou de manche de fourche. Je me souviens d’un détail qui m’avait fait rire, l’un deux se regardait dans le reflet d’une poêle briquée par Maman et tournait sur lui-même en sautant d’un pied et de l’autre et en chantant.
Par contre Cheval Rouge, lui, était fortement intrigué par le fusil de mon père et l’avait pris en main. Par habitude, me sentant rassuré et mon père m’ayant bien appris, j’avais vidé l’auget de sa poudre. Cheval Rouge disait : » Beau Pennsylvanian ! » et mon père lui répondait : « Non, c’est un Kentucky !!!» de là naquit un jeu entre eux deux qui dura toute leur vie sur le nom de ce fusil à silex.
Les mois ont passé au bord de la « Marias river » et les liens s’étaient renforcés avec les Gros Ventres à tel point que lors d’une fête en notre honneur dans leur village mon père et Cheval rouge s’entaillèrent la main et se la serrèrent mutuellement pour devenir « frères de sang » un pacte indéfectible par l’homme disaient-ils. Pendant ces mois je m’étais fait un ami du fils de cheval rouge qui devait avoir à peu près le même âge que moi et nous passions nos temps libres à courir la plaine et essayer de monter à cru sur les chevaux à peine débourrés en collectionnant les chutes et en riant tant qu’on le pouvait.
Mais je sentais bien comme un malaise à notre égard par moment dans la tribu. Ils se taisaient parfois à notre arrivée. Un soir, alors que nous étions dans leur village de tentes, ils demandèrent à mon père de les rejoindre dans le teepee de Griffe d’ours debout. Les enfants n’ayant pas le droit d’assister aux discussions des grands, nous nous glissâmes dans la nuit derrière le teepee avec Tim le fils de cheval rouge, allongés dans l’herbe mouillée et prêtant l’oreille. Il était question des Trappeurs Blancs qui devenaient trop nombreux et envahissants à leur goût. Ils avaient déjà eu des frictions sanglantes avec les trappeurs et la compagnie des peaux à « Pierre’s Hole » ou se tenait le « Rendez-Vous ». Le rendez-vous est un terme Français qui est resté et qui désigne l’endroit où se font les ventes des fourrures par les trappeurs et les indiens à la « compagnie de la Baie d’Hudson » et de la « Rocky Mountain Fur Company » .
Jugeant que les trappeurs ne respectaient pas les règles de préservations animales et voyant le gibier disparaitre comme neige au soleil, ils s’en étaient ouverts lors d’un de ces fameux « rendez-vous », mais n’avaient pu raisonner les blancs et arriver à un accord. Et l’histoire n’avait fait que croitre et s’amplifier depuis des années. Les Gros Ventres paraissaient embêtés vis-à-vis de mon père car affamés, ils se préparaient à une action en force contre les blancs. D’ailleurs lors d’un pow-wow avec les « Black-feets » leurs cousins, parlant également l’algonquien leur langue d’origine, l’idée avait été émise mais non retenue par ces derniers souvent alliés par intérêt avec les blancs. Les Atsinas, nom que se donnaient les gros ventres, en partir courroucés en dénonçant leur alliance filiale.
Mon Père eu beau leur expliquer que tous les blancs n’étaient fait avec le même moule, Griffe d’ours debout lui signifia que ça il le savait, mais qu’il ne connaissait que ce moyen pour se faire craindre et respecter, sinon il leur faudrait, eux, changer de territoire, se mettre en quête de trouver le bon et que les tribus voisines n’étaient pas tous amies et verraient d’un très mauvais œil une incursion sur leurs terres, surtout les Crows avec lesquels ils se battaient régulièrement.
S’en suivi de longues discussions qui n’aboutirent à rien ce soir là, puis ce furent les chants. Tim écarta doucement un pan de la tente pour que l’on puisse regarder en catimini. Ils étaient tous assis en tailleur autour d’un feu situé au centre de la grande tente et se passaient tour à tour cette grande pipe qu’ils appellent calumet. Au sortir de la tente, Je trouvais mon père inhabituellement calme et rêveur malgré tout ce qui avait été dit. Peut-être était-il songeur ou l’esprit embrumé par le calumet. Toujours est-il que le lendemain matin il y eut conseil de famille dans notre campement.
Impossible pour mon père de participer avec eux, comme ils l’auraient souhaité, à une quelconque bagarre avec les blancs et ma mère dit qu’elle avait vu assez de morts dans son pays et que ce n’était pas notre cause même si les Gros ventres nous avaient adoptés.
à suivre .....
Après avoir quitté la Louisiane vers 1829 mes parents et leur fils unique que je suis, sommes arrivés au terme d’un très long périple au Nord de ce que mon père appelait le Nord, pratiquement à la frontière d’un autre pays des grands froids, le Canada.
Au cours de notre voyage interminable sur et dans le chariot bâché tiré par deux bons chevaux de labours achetés à bas prix, nous avons rencontré pas mal de spécimens de la race humaine. Des blancs, des noirs, des rouges, mais pas de jaunes. Les blancs et les noirs je les connaissais, mais les indiens m’intriguaient par leurs langages que je ne comprenais pas, leur façon d’être, leur maintien, leurs vêtements, bref pour moi enfant, ils semblaient venus d’ailleurs, mystérieux.
Plus tard j’ai compris qu’en fait, ils n’étaient pas d’ailleurs, mais bien sur la terre de leurs ancêtres et que nous, étions comme des intrus sur leur sol. Ce qui expliquait le comportement de certains groupes hostiles que nous avions croisé sur notre route.
Ceux qui m’avaient le plus intimidés étaient les Cheyennes. J’avoue rétrospectivement avoir été marqué par leur rencontre. Ils étaient pour moi plus grands et longilignes que les autres et me paraissaient aussi plus farouches. Le genre d’hommes qui d’un seul regard te fait comprendre que la vie est éphémère.
Je les trouvais différents et plus nerveux que les Sioux qui eux avaient de magnifiques coiffures et de belles broderies sur leurs vestes. Ceux-là me paraissaient plus calme, plus fiers, mais guère plus câlins, mais ne nous ont jamais attaqué, pas plus que les autres d’ailleurs. Souvent ils nous suivaient des journées entières à bonne distance, mais ne cherchaient pas le contact, sauf quelques fois quand ils s’enhardissaient pour nous quémander du café ou vouloir faire du troc.
Et puis nous voilà arrivés face à cette tribu peinte en blanc avec des traits rouges sur les joues, nous barrant le chemin au pied de la colline avec leurs mains écartées devant leur ventre.
Quelques jours auparavant nous avions croisé un trappeur qui marchait à pied tenant à la bride une mule chargée de son équipement et tirant un travois indien chargé de peaux de toutes sortes.
Voyant le Kentucky de mon père, il lui demanda si nous étions également trappeurs en quête d’un coin pour la chasse. Il parut soulagé quand mon père lui répondit par la négative et nous expliqua que dans cette contrée une tribu de peaux rouges s’en prenait méchamment aux trappeurs en général et qu’il serait bon de les éviter.
Mais revenons quelques pas en arrière quand nous nous trouvions assis face à ces guerriers, car sans aucun doute possible c’en étaient au vu de leurs peintures.
La palabre, à mon grand étonnement se faisait en grande partie en Français et par gestes. Le Guerrier assis à côté du chef avait fier allure et c’est lui qui s’exprimait très bien dans notre langue filiale et le Chef ponctuait les phrases par des hochements de tête et des « Oui, Oui …»
Il nous expliqua qu’ils faisaient partie de la tribu des « Gros Ventres » ainsi nommés par les Français dont ils furent longtemps amis il y a beaucoup de lune passées et que lui-même « Cheval rouge » et son frère le chef assis à côté de lui « Griffe d’ours debout » avait eu un Grand père Trappeur Français, Breton d’origine, qui avait vécu dans la tribu la plus grande partie de sa vie et avait épousé une femme indienne de la tribu des faces plates (Flat Heads) prisonnière des Gros Ventres.
Ce à quoi mon père répliqua qu’il avait les mêmes origines et que certainement le même sang coulait dans nos veines.
La glace était définitivement rompue et ils nous guidèrent jusqu’à une immense prairie au bord d’une rivière pour établir notre campement. Ils nous regardaient faire d’un air curieux et amusé, inspectant les casseroles et marmites en métal de ma mère qui pour une fois ne les virait pas à coup de torchon ou de manche de fourche. Je me souviens d’un détail qui m’avait fait rire, l’un deux se regardait dans le reflet d’une poêle briquée par Maman et tournait sur lui-même en sautant d’un pied et de l’autre et en chantant.
Par contre Cheval Rouge, lui, était fortement intrigué par le fusil de mon père et l’avait pris en main. Par habitude, me sentant rassuré et mon père m’ayant bien appris, j’avais vidé l’auget de sa poudre. Cheval Rouge disait : » Beau Pennsylvanian ! » et mon père lui répondait : « Non, c’est un Kentucky !!!» de là naquit un jeu entre eux deux qui dura toute leur vie sur le nom de ce fusil à silex.
Les mois ont passé au bord de la « Marias river » et les liens s’étaient renforcés avec les Gros Ventres à tel point que lors d’une fête en notre honneur dans leur village mon père et Cheval rouge s’entaillèrent la main et se la serrèrent mutuellement pour devenir « frères de sang » un pacte indéfectible par l’homme disaient-ils. Pendant ces mois je m’étais fait un ami du fils de cheval rouge qui devait avoir à peu près le même âge que moi et nous passions nos temps libres à courir la plaine et essayer de monter à cru sur les chevaux à peine débourrés en collectionnant les chutes et en riant tant qu’on le pouvait.
Mais je sentais bien comme un malaise à notre égard par moment dans la tribu. Ils se taisaient parfois à notre arrivée. Un soir, alors que nous étions dans leur village de tentes, ils demandèrent à mon père de les rejoindre dans le teepee de Griffe d’ours debout. Les enfants n’ayant pas le droit d’assister aux discussions des grands, nous nous glissâmes dans la nuit derrière le teepee avec Tim le fils de cheval rouge, allongés dans l’herbe mouillée et prêtant l’oreille. Il était question des Trappeurs Blancs qui devenaient trop nombreux et envahissants à leur goût. Ils avaient déjà eu des frictions sanglantes avec les trappeurs et la compagnie des peaux à « Pierre’s Hole » ou se tenait le « Rendez-Vous ». Le rendez-vous est un terme Français qui est resté et qui désigne l’endroit où se font les ventes des fourrures par les trappeurs et les indiens à la « compagnie de la Baie d’Hudson » et de la « Rocky Mountain Fur Company » .
Jugeant que les trappeurs ne respectaient pas les règles de préservations animales et voyant le gibier disparaitre comme neige au soleil, ils s’en étaient ouverts lors d’un de ces fameux « rendez-vous », mais n’avaient pu raisonner les blancs et arriver à un accord. Et l’histoire n’avait fait que croitre et s’amplifier depuis des années. Les Gros Ventres paraissaient embêtés vis-à-vis de mon père car affamés, ils se préparaient à une action en force contre les blancs. D’ailleurs lors d’un pow-wow avec les « Black-feets » leurs cousins, parlant également l’algonquien leur langue d’origine, l’idée avait été émise mais non retenue par ces derniers souvent alliés par intérêt avec les blancs. Les Atsinas, nom que se donnaient les gros ventres, en partir courroucés en dénonçant leur alliance filiale.
Mon Père eu beau leur expliquer que tous les blancs n’étaient fait avec le même moule, Griffe d’ours debout lui signifia que ça il le savait, mais qu’il ne connaissait que ce moyen pour se faire craindre et respecter, sinon il leur faudrait, eux, changer de territoire, se mettre en quête de trouver le bon et que les tribus voisines n’étaient pas tous amies et verraient d’un très mauvais œil une incursion sur leurs terres, surtout les Crows avec lesquels ils se battaient régulièrement.
S’en suivi de longues discussions qui n’aboutirent à rien ce soir là, puis ce furent les chants. Tim écarta doucement un pan de la tente pour que l’on puisse regarder en catimini. Ils étaient tous assis en tailleur autour d’un feu situé au centre de la grande tente et se passaient tour à tour cette grande pipe qu’ils appellent calumet. Au sortir de la tente, Je trouvais mon père inhabituellement calme et rêveur malgré tout ce qui avait été dit. Peut-être était-il songeur ou l’esprit embrumé par le calumet. Toujours est-il que le lendemain matin il y eut conseil de famille dans notre campement.
Impossible pour mon père de participer avec eux, comme ils l’auraient souhaité, à une quelconque bagarre avec les blancs et ma mère dit qu’elle avait vu assez de morts dans son pays et que ce n’était pas notre cause même si les Gros ventres nous avaient adoptés.
à suivre .....
_________________
Sujets similaires
» Just call me Mortimer: le Kentucky à silex chez les Gros Ventres part 2/3
» 2/ Just call me Mortimer: le Kentucky à silex chez les Gros Ventres part 3/3
» 1/ Just call me Mortimer: "la génèse"
» Kentucky a silex
» Restauration d'un Kentucky silex
» 2/ Just call me Mortimer: le Kentucky à silex chez les Gros Ventres part 3/3
» 1/ Just call me Mortimer: "la génèse"
» Kentucky a silex
» Restauration d'un Kentucky silex
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum