fête du Moyen Age à l'Empire à La Brigue 06, 15/16 juillet 2017

Mon bon Simon, te voir en costume m'a ramené bien des décennies en arrière.
J'étais jeune papa et nous aménagions le lopin de terre canadien où les hasards de la vie nous avaient conduits, mon épouse et moi-même, à débâter notre mule avant la manger.
En effet, il n'y avait pas de restau ni de supermarket dans ce coin encore assez isolé. Maintenant il s'y trouve un supermarché avec parking en surface et en sous-sol pour l'hiver, avec prises électriques pour réchauffer les moteurs avent de redémarrer le char après avoir magasiné.
C'était l'été local, c'est à dire le 16 juillet entre 7h30 et 18h15.
Nous vaquions dans a clairière qui s'élargissait tandis que s'entassaient les billes de bois à brûler l'hiver - qui allait commencer incessamment avant le soir en attendant septembre où les indiens ont usage de refaire un peu de belle saison - et nous avions attaché notre premier né à un piquet enfoncé dans le sol fraîchement décongelé. Évidemment, un piquet ! Le parc à bébé n'était pas encore inventé et de toute façon Manufrance Saint-Étienne n'existait pas non plus. Ni le service Colissimo, ni UPS...
Adonc, notre bébé qui ne parlait pas encore vraiment - il n'avait que huit ans, et commençait tout juste à marcher - notre bébé, donc, observe le passage des feuilles d'arbres et le vol des lapins quand passe un homme au cheveu noir et lisse portant une plume dans les cheveux. C'est un Mohican de l'armée en déroute qui se traine sans gland sur le bord de la route. N'exagérons rien, en fait de route, ce n'est encore qu'une sente forestière.
Notre fils fait entendre sa voix de Centaure - c'est à dire de revolver à l'accent de Belge bourré à la bière le 21 Juillet - et hurle la locution mystérieuse qui est le seul son qu'il émet lorsqu'il est en joie : "Tapon ! Tapon ! Tapon !..."
Sans doute préoccupé par le sort que lui réserve la version humaine du grand Manitou, à savoir Fenimore Cooper, pour la fin de son ouvrage, le Mohawk passe sans répondre après avoir lancé un regard torve à l'enfant. Vient ensuite un être velu qui m'aurait fait penser à Demis Roussos s'il avait déjà montré sa toison sur Terre ; il s'agit d'un ours local les babines engluées de miel sauvage. Le grognon velu considère notre fils qui a recommencé son antienne : "Tapon ! Tapon ! Tapon !..." Le plantigrade a un visage au moins aussi expressif que celui de Louis de Funès et manifestement se demande comme peut faire tant de bruit un avorton qui doit être mort, vu l'odeur de cadavre avancé qui émane de ses langes. Le fauve poursuit sa route avec un air dégoûté. Heureusement, car je n'ai pas de poudre pour charger mon Kentucky de chez Armi Jäger !
Arrive enfin, toujours en marche vers l'ouest, un amérindien à l'allure assurée et prospère qui note : "Il va falloir que je dise à Maria Chapdeplomb de tisser beaucoup de laine pour la distribuer à notre tribu. L'hiver sera froid sans aucun doute. Pour citer un de ces Mohicans-mohawk primitifs : Homme blanc couper beaucoup bois." Puis se tournant vers notre fils :
"Étant donné es circonstances et après analyse objective de la situation, je vois que l'entendement de cet enfant paraît encore limité." Il s'adresse alors à l'enfant qui une fois encore hurle de sa voix de crécelle : "Tapon ! Tapon ! Tapon !..." et lui dit : "Huron, huron, petit, pas tapon."