Un stand de tir sympa et pas dangereux

Ça rappelle les parcours sous tirs à balles réelles à Coëtquidan et dans certains centres d'entraînement commando. Nous y apprenions, puis ensuite y avons enseigné, à entendre les balles passer puis à reconnaître les calibres au passage. Nos fusils d'élèves étaient des FAS 49-56 en 7,5 mm Mle 29 mais nous passions sous les balles de 12,7 puis sous celles des FM AA 52  en 7,5 mm, puis sous celles de 223 tirés avec des M 16 par les moniteurs du cours Tir Armement Munitions (appelé "cours TAM") et enfin sous les balles de 9 mm tirées au PM MAT 49.
Pour l'ambiance on faisait une traversée du champ de tir en marchant courbés, en rampant, ou en en courant* toujours courbés en fin de zone à franchir. En fait, si nous avions marché debout, même les plus grands d'entre nous ne risquaient rien en raison des mesures de sécurité. Nous passions sous la zone de vol des balles à environ 150 m des pas de tir d'armes longues (mitrailleuses, FM et M 16) et à 100 du pas de tir PM. Et c'est vrai, le claquement de l'onde sonore provoquée par les munitions supersoniques est assez fort.

* Je précise qu'au combat, on ne court pas, on marche. Sauf pour l'assaut et encore dans certaines circonstances seulement. Mais à Saint-Cyr l'encadrement ne rate pas une occasion de faire courir les élèves-officiers pour les endurcir.

Surtout pas ! Quand on est normal comme ça, il faut surtout pas aller voir un psy. Nous, nous avons bien tué Garcia en tirant une balle de 9 réglementaire tirée dans un tuyau de poêle. Et alors ?
Pour éclaircir un peu cette phrase sibylline, voici l'histoire.
C'était en 1960 ou début 61. Quand mes frères rentraient en permission depuis l'Algérie, ils quittaient leurs garnisons sur la Ligne Maurice en uniforme et armés. Une fois arrivés à Alger, ils laissaient leurs armes à l'armurerie du dépôt mais gardaient les munitions pour les avoir afin de recharger leurs armes en rentrant de permission.
Dans la cantine d'un de mes frères nous avons trouvé  des cartouches sous les treillis et nous en avons piqué une de 9 mm.
Nous habitions un mas près de Nîmes. Le parc était entouré par un mur haut de trois mètres côté mistral, d'un mur bahut d'un mètre avec une grille en fer forgé et portail à deux battants aucentre, ce mur étant opposé et parallèle à la façade du mas. Parallèle au mur haut anti-mistral un mur bahut d'un mètre avec grille fermait le parc à droite en regardant le parc dos au mas. Ce dernier mur donnait par un portail sur une cour, celle de la ferme où un métayer cultivait les terres lesquelles faisaient le rapport de l'ensemble terres mas et ferme. Le métayer se nommait Garcia.
Le mur anti-mistral était longé par une haie de lauriers-sauce et dans ce mur il y avait un trou qui permettait aux deux c..s que nous étions de tirer au canon avec un vieux tuyau de poêle pour défendre le Fort Apache dont notre mas avait pris le rôle.
Notre chien Patachon donnant en ce qui le concernait l'image d'un Rintintin fauve et bouclé, de la même taille que le chien de Rusty mais avec l'aspect d'un berger portugais.
Or donc, un jeudi après-midi nous avions mis la main sur cette cartouche de 9 mm Mle 49. Mais comment la tirer, sans arme ?
Nous avons pensé au canon qui défendait le Fort. Aussitôt dit, aussitôt fait, nous avons enroulé la cartouche dans un rouleau de papier journal (Le Provençal) et l'avons posée la balle vers l'extérieur du parc dans le tuyau de poêle canon. Avec des allumettes prises dans la cuisine, nous avons mis le feu au papier. Au moment de me retirer j'ai aperçu devant le tube, à une cinquantaine de mètres, Garcia en train de sarcler les pommes de terres. Trop tard le papier brûlait et nous nous sommes écartés de part et d'autre du tube. Au moment où nous allions regarder pourquoi la balle ne pétait pas la cartouche a éclaté avec un bruit de gros pétard à mèche et un éclat, sans doute le culot, a arraché un bout d'écorce et d"aubier dans un tronc de laurier sauce.
Alors nous avons regardé pensant voir Garcia se tordre dans les affres d'un blessure horrible. C'était prie que ça ! La balle était sans doute puissante parce que même le cadavre de Garcia s'était volatilisé. J'ai dit à mon jeune frère :"On a tué Garcia ! Quelle rouste on va prendre !"
En fait non. Garcia, habitué à entendre des pétards à mèche résonner dans le parc du mas n'avait même pas fait d'infarctus. Le temps que la cartouche chauffe, il avait tranquillement sarclé assez de longueur de sillon de patates pour avoir disparu de notre champ de vision.
C'est un peu inquiets de la rouste à venir que nous nous sommes mis devant la télé à chaîne unique pour regarder "L'Antenne est à nous" qui le jeudi nous dispensait la culture ouesterne de l'époque avec pendant quelques semaines Rintintin, puis Roy Rogers, puis d'autres séries qui m'ont moins marqué.
Mais il n'était pas tout à fait 16 heures et nous écoutions la musique de fond, fascinés par l'horloge à spirale de la RTF dont la grande aiguille avançait lentement vers le point des 12 heures. C'est alors que nous avons entendu la voix de Garcia qui parlait avec sa femme dans la cour de la ferme. Ouf, il était rescapé de la bataille du Fort Apache. Pas de rouste en perspective, nous allions pouvoir regarder Roy Rogers en paix !

Attention, les mises en ligne de la première partie ont été diffusées par un portail qui n'existe plus, Voila.
Pour retrouver ces chapitres, il faut passer par le lien suivant :
En bas de cette page vous avez les liens vers les 65 chapitres de cette "Saga".

Première Partie : Nouveaux Mondes. 43 chapitres, 651 pages

Deuxième partie : Vie et Mort en Amérique du Nord, Nouvelles d'un monde qui se recrée. 17 chapitres, 254 pages

Troisième partie :  Vers l'Avenir. 5 chapitres rédigés. Le 6^e chapitre est en cours de rédaction est sera le 66^e de toute la "Saga".